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Howard Law

Pourquoi les défenseurs des sites de piratage font fausse route

Une réaction virulente à une proposition logique cache généralement quelque chose.


Les critiques à l’égard de la campagne contre le piratage de Franc-Jeu Canada, lancée la semaine dernière, ne font pas exception.


Il est communément admis que c’est mal de voler, que le vol fait des victimes et que la règle de droit, ainsi que la moralité élémentaire, veut que l’on punisse celui-ci.


Or, il est pratiquement impossible d’appliquer la règle de droit aux sites Web de piratage étrangers. C’est comme jouer au chat et à la souris. D’où la proposition de Franc-Jeu Canada de cibler seulement les « sites Web de piratage évidents ».


Les opposants farouches à Franc-Jeu, dont l’avocat spécialisé dans le droit d’auteur Michael Geist, Open Media et d’autres libertariens d’Internet, ont dû trouver un moyen d’occulter la logique fondamentale et l’équité de la campagne contre le piratage.


Les propos de M. Geist alimentent la méfiance de ceux qui crient au complot. Il considère que le blocage des sites Web de piratage reconnus représente une pente glissante risquant de mener à la censure gouvernementale du reste d’Internet. Un grand nombre d’amateurs d’Internet gobent cela.


De plus, M. Geist prétend que la proposition de Franc-Jeu est boiteuse parce qu’aucun juge n’examinerait la liste des pirates les plus recherchés avant de les bloquer.


Comme M. Geist le sait en tant qu’avocat, les commissaires du CRTC exercent les fonctions de juges administratifs, plutôt courantes dans le monde juridique canadien. Ils ne bénéficient peut-être pas de la sécurité d’emploi à vie des juges vêtus de noir que M. Geist favorise, mais ces arbitres experts en télécommunications et en radiodiffusion sont désignés par le même gouvernement fédéral qui nomme leurs homologues en robes noires. Dans l’éventualité où les commissaires du CRTC n’arriveraient pas à distinguer un site de piratage notoire d’une manifestation de la liberté d’expression, la Cour d’appel fédérale interviendrait.


N’oubliez pas que la proposition de bloquer des sites Web n’a rien à voir avec le discours juridique ni la liberté d’expression. C’est l’équivalent numérique de cadenasser un entrepôt plein de DVD volés. L’argument de la pente glissante est une spécialité des groupes d’intérêt comme la National Rifle Association : si on interdit les armes d’assaut, on finira forcément par interdire les pistolets de poche.


Comme nous l’ont rappelé les événements qui se sont produits dernièrement au Kenya, un gouvernement autoritaire qui souhaite fermer les stations de télévision qui présentent ses adversaires politiques n’a pas besoin de pente glissante. Ils le font tout simplement.


Mais nous sommes au Canada, où existe une longue tradition de règle de droit et de liberté d’expression, pas au Kenya ou en Russie.


L’autre principale objection à la proposition de Franc-Jeu est bien résumée par une publication récente sur notre page Facebook : « Je n’aurais pas recours à d’autres sources de données en continu si la télévision par satellite était offerte à prix raisonnable et parfaitement adaptée à mes besoins. »


Il ne fait aucun doute que les usagers de ces sources croient que les câblodistributeurs exigent des frais trop élevés et devraient fonctionner comme Netflix. Bref, s’ils pouvaient visionner tous les films et les matchs qu’ils veulent pour 10,99 $ par mois, ils n’auraient pas besoin d’écouter du contenu piraté.


Néanmoins, cet argument ne tient plus lorsqu’on l’analyse minutieusement.

Tout d’abord, il faut rendre à César ce qui appartient à César. On doit reconnaître le succès incroyable de Netflix. Il s’est hissé au sommet des chaînes vidéo au Canada grâce à ses outils de navigation conviviaux, à son envergure mondiale et à son bas tarif d’abonnement mensuel. Netflix n’a jamais fait d’argent et est endetté de milliards de dollars.


Il est impossible de visionner la plupart des films de deuxième fenêtre, c’est-à-dire ceux qui se font pirater, sur Netflix. Netflix ne diffuse pas non plus les matchs de soccer internationaux qui attirent un si grand public illicite, car ils coûtent trop cher pour être revendus 10,99 $ par mois. En revanche, les câblodistributeurs achètent ces films à succès et ces manifestations sportives à des prix exorbitants et les revendent à leur juste valeur.


Il n’en reste pas moins que les entreprises médiatiques canadiennes essaient autant que possible d’émuler Netflix. Confronté au géant Netflix, Bell Média propose CraveTV (7,99 $ par mois). Rogers et Shaw ont lancé Shomi à 8,99 $ par mois, mais il n’a pas fait long feu. Bell vient de mettre de l’avant Snackable TV, une application gratuite de courtes bandes vidéo.


Le plus ironique, c’est que Netflix, à 10,99 $, coûte encore trop cher au goût de certains. Dans le monde entier, Netflix et d’autres entreprises de diffusion en continu perdent 30 milliards de dollars par année au profit de sites de piratage, et ce chiffre ne cesse d’augmenter.

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